Polarisation gauche-droite dans les manifestations écologistes.
En mettant en vedette les militants antifas et ceux de la droite dite identitaire; les manifestations qui s’organisent ces jours-ci, pour la défense de l’environnement ou pour mettre exergue un enjeu social ou politique important, rappellent un climat de confrontation idéologique déjà vécu au Québec.
Pour ceux et celles qui ont suivi l’histoire de la militance au Québec, ces souvenirs du passé donnent à craindre la prédominance sur la place publique des confrontations idéologiques nuisibles aux efforts requis pour faire entendre des causes. Ce fut récemment le cas suite à la publication par le gouvernement provincial des détails relatifs à l’exploitation des hydrocarbures qui suivait le projet de loi 106b de décembre 2016. Une manifestation s’est rapidement organisée pour samedi 7 octobre à Québec, la manifestation « L’eau, c’est sacré ».
La suite des événements entourant cette manifestation a clairement laissé apparaître le retour sur la scène des oppositions entre groupes radicalisés du style années 1980-1990. On les a vus se continuer le 25 novembre.
Ce sera probablement le cas les jours qui viennent.
On a pu se rendre compte de la facilité avec laquelle les factions antagonistes radicalisées peuvent s’inviter à n’importe quelle manifestation. C’est un indicateur certain de la forte probabilité de les trouver plus souvent sur les lieux de manifestations publiques et d’assister à des confrontations idéologiques qui ne feront que détourner l’attention du public de l’enjeu de l’événement.
La réémergence de telles confrontations risque de sonner le glas de la belle idée de la mobilisation des masses depuis longtemps perçue comme un moteur de changement.
Avoir en tête une contestation pacifique ne suffit pas
Maintenant, en organisant un événement public mobilisateur du plus grand nombre, il faut cesser de se croiser les doigts et souhaiter que tout aille bien. Les militants écologistes doivent dorénavant s’aviser de la très forte probabilité de présence de ces factions antagonistes sur les lieux des manifestations.
Une perspective inquiétante qui n’offre en principe aux organismes que deux options : travailler avec les forces policières pour tenir à l’écart les groupes radicalisés lors des manifestations de dernière minute, avec le risque de se faire traiter de « simples réformistes », et donc devenir eux même la cible des groupes radicalisés; ou compter sur un service d’ordre autonome pour les manifestations planifiées. Dans ce dernier cas, cela requiert un approfondissement de la notion de service d’ordre pour pouvoir organiser son propre service. L’autre issue est de miser sur une collaboration avec des organisations aguerries tel que les syndicats ou associations étudiantes.
Cette perspective commence à nous faire penser aux approches développées dans le cadre de services d’accompagnement préventif internationaux. En s’en inspirant de l’action directe citoyenne les organisateurs pourraient ainsi intégrer des consignes claires et utiles comme la non partisannerie lors des manifestations, la mobilisation basée sur une déclaration préalable à laquelle les manifestants devront adhérer et se conformer.
Les leçons du passé
Par le passé, nous avons pu le constater, plus que de focaliser l’attention sur un enjeu politique prioritaire, c’est la confrontation gauche révolutionnaire/droite identitaire à inspiration parfois religieuse qui a monopolisé l’espace public.
Les organisations féministes ont dû y faire face dans le passé, et nous avons expérimenté la situation au début des années 1980 avec les manifestations pour la paix. Autrement dit, rien de nouveau sous le soleil!
Aussi peut-être sera-t-il nécessaire de revenir à certaines vieilles pratiques.
Déclaration de base : Ces années-là, pour assurer un minimum de fédération des mobilisations, les organismes antimilitaristes, pacifistes et pour la Paix débutaient l’organisation d’une manifestation par une déclaration de base qui devait être adoptée par le comité organisateur. Souvent, c’est à cette étape que certaines organisations révolutionnaires s’excluaient du processus.
En demandant aux organisations d’endosser une déclaration de base qui incluait des principes de non-alignement, de non-agression et de respect, il devenait difficile de s’insérer dans une manifestation pour y provoquer le grabuge.
A cette période, les organismes pour la paix étaient régulièrement accusés de « faire le jeu des soviétiques » lors de leurs manifestations publiques. Les organismes ou les individus qui n’acceptaient pas les principes de base de l’action, n’avaient simplement pas d’affaire là!…. Ces déclarations ont toujours levé les ires et complaintes des organisations révolutionnaires.
En bout de ligne, après avoir claqué la porte des comités organisateurs, ces organisations se pliaient pratiquement toutes aux consignes et aux bases d’unité, bien sûr en s’assurant de maugréer.
Des collaborations de renforcement : Un travail étroit s’effectuait avec les organisations syndicales et étudiantes pour l’organisation des services d’ordre. Les comités formés pour ces fonctions devaient envisager des consignes et des procédures de protection des participants advenant une escarmouche entre les groupes révolutionnaires et certaines organisations à tendance droitiste associées à des tendances religieuses fondamentalistes.
La formation :
Nous devrons fort probablement envisager des formations aux techniques d’action non-violente pour les organisateurs et le service d’ordre ou, disons, le service d’accompagnement des mobilisations publiques.