Écrit par Amnestie Internationale
Au cours des derniers mois, Amnistie Internationale a observé de nombreuses tentatives des autorités russes d’interférer avec le droit à la liberté de réunion, d’association et d’expression, notamment des partisans de l’opposition politique, ainsi que de militants des droits humains et de journalistes.
Garry Kasparov, un dirigeant de l’opposition, a été arrêté ce 24 novembre et condamné à une détention administrative de cinq jours pour avoir censément mené une manifestation non autorisée et résisté à son arrestation par la police. Plusieurs témoins ont déclaré à Amnesty International qu’ils avaient surpris des conversations de policiers indiquant que la détention de Garry Kasparov était prévue avant la manifestation. Amnesty International le considère comme un prisonnier d’opinion et demande sa libération immédiate.
«De l’arrestation et la mise en détention, sans provocation, du dirigeant de l’opposition Garry Kasparov, aux passages à tabac de journalistes et de défenseurs des droits humains, jusqu’au recours excessif à la force contre des manifestants pacifiques, les autorités russes ont créé un climat où il est difficile, voire impossible, d’exprimer des points de vue critiques ou de les signaler», a déclaré Nicola Duckworth, directrice du programme Europe et Asie centrale à Amnesty International.
Ces 24 et 25 novembre, des policiers ont placé plusieurs dizaines de personnes en détention avant, pendant et après les «marches de protestation» dans plusieurs villes russes, en frappant ces personnes à cette occasion. À Saint-Pétersbourg, la militante des droits humains russe Ella Poliakova, présidente du Comité des mères de soldats de Saint-Pétersbourg, a été placée en détention avec plusieurs autres personnes le 25 novembre pendant douze heures, après avoir assisté à une conférence de presse du parti d’opposition Iabloko.
Amnesty International est préoccupée d’un certain nombre de violations du droit à un procès équitable pour les personnes détenues en lien avec des manifestations. Lors des audiences, les tribunaux n’ont pas respecté les normes internationales pour un procès équitable, les juges refusant d’écouter les éléments fournis par les prévenus, certains d’entre eux, dont Garry Kasparov, étant empêchés de voir leurs avocats avant et après l’audience. De nombreuses personnes ont été placées en détention pendant plus de trois heures, la durée maximale dans ces circonstances. L’une de ces personnes aurait également été passée à tabac par des policiers qui lui ont refusé les soins médicaux nécessaires lorsqu’elle a comparu devant un tribunal de Moscou.
«Le devoir de l’État de préserver l’ordre public et de protéger les droits et libertés des personnes éventuellement affectées par les manifestations publiques ne justifie nullement le recours excessif à la force contre des manifestants pacifiques, et ne saurait servir d’excuse à la répression de l’opposition», a ajouté Nicola Duckworth.
Amnesty International est également très préoccupée de l’agression ayant entraîné la mort de Farid Babaïev, un important militant politique oeuvrant pour les droits humains. Farid Babaïev était le premier candidat sur la liste du parti Iabloko pour les élections à la Douma d’État russe, dans la république méridionale du Daghestan. Le soir du 22 novembre, Farid Babaïev a été mortellement blessé par des tireurs inconnus en sortant de son appartement à Makhatchkala, la capitale du Daghestan. Il est décédé deux jours plus tard à l’hôpital. Des proches et des militants des droits humains ont indiqué que les opinions politiques ouvertement exprimées par Farid Babaïev pourraient être à l’origine de cet homicide, tandis que les autorités auraient refusé d’attribuer une quelconque motivation politique à cet acte.
Amnesty International exprime à nouveau son inquiétude quant à l’enlèvement et aux mauvais traitements infligés à Oleg Orlov, président du Centre russe «Memorial» de défense des droits humains, et à trois journalistes de la chaîne de télévision russe REN TV. Dans la nuit du 23 au 24 novembre, ces quatre personnes ont été enlevées dans un hôtel de Nazran, en république d’Ingouchie, par des hommes cagoulés en tenue de camouflage. Oleg Orlov et les trois journalistes ont été conduits à l’extérieur de la ville et abandonnés dans un champ, après avoir été roués de coups et menacés d’être abattus.
«La réduction au silence des médias et des défenseurs des droits humains, ainsi que le harcèlement et le mauvais traitement de ceux qui dénoncent les violations des droits humains ou qui expriment leur opposition, sont inacceptables et inexcusables, que ce soit pendant la période électorale ou des périodes de préoccupations relatives à la sécurité», a déclaré Nicola Duckworth.
Amnesty International publie ce 28 novembre une brochure sur les défenseurs des droits humains dans le Caucase du Nord, en demandant aux autorités de respecter le travail légitime des défenseurs des droits humains, des avocats et des journalistes, et de s’abstenir de toute ingérence illégale dans leur travail.
Article provenant de : www.amnistie.ca