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PaJu : des Palestiniens et des Juifs qui s’unissent

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Entrevue avec Bruce Katz par Jean-François Giroux

J’ai rencontré Bruce Katz dans un resto de Saint-Henri où il m’a généreusement invité. Cet ancien militant contre la guerre du Vietnam est un des membres fondateurs de PAJU – Palestiniers et Juifs Unis. Créé en 2000 à la suite de la seconde Intifada, PAJU tient religieusement une vigile tous les vendredis depuis février 2001.

«Et ça va continuer tant et aussi longtemps que l’occupation israélienne va exister» me dit Bruce. Ce qu’on a pu réaliser depuis quatre années laisse présager un assez grand changement dans la communauté juive. C’est très prometteur. Il y a une remise en question de la nature du sionisme qui est issu des mouvements nationalistes ethniques de l’Europe de l’Est. La religion est « ethnicisée » dans un mouvement politique alors que 70% des Juifs se disent séculiers! Il y a également la légitimité de la politique israélienne qui est questionnée. Il est fini le temps où les Juifs acceptaient aveuglément les diktats d’organisations qui ne représentent que l’État et la ligne officielle. Je m’en réjouit car c’était un des objectifs que j’avais en faisant partie de PAJU.»

Parmi les fondateurs de PaJu, il me signale son grand ami palestinien Rezek Faraj, enseignant à la retraite, qui fait actuellement parti d’un projet Oxfam-Québec dans les territoires occupés. Plusieurs autres faisaient déjà partie de l’Alliance juive contre l’occupation (AJCO), formée un peu avant PAJU. À l’origine de l’Alliance on retrouve Freda Guttman – qui allait inspirer la création de PAJU – et Robert Silverman.

Si au début il y avait principalement des membres des diasporas juive et palestinienne, bientôt ils furent rejoints par une population multiculturelle de tout horizon. Aujourd’hui, une grande part des sympathisantEs sont francophones. Grâce à ses nombreux contacts, Rezek Faraj a pu présenter PaJu partout au Québec, dans les universités et les cégeps, de Chicoutimi aux Îles-de-la-Madeleine. Michel Chartrand, grand ami de Rezek, « a joué un rôle central dans la reconnaissance de la question palestinienne au Québec. C’est vraiment la première personne non-palestienne au Québec qui a osé parlé des injustices contre les Palestiniens. Des gens d’une telle franchise ça ne se trouve pas sur chaque coin de rue.»

Le PaJu a obtenu l’appui de députéEs du parlement canadien sympathiques à la cause palestinienne. Mais nous voilà devant une situation paradoxale. « Si vous allez sur le site web des Affaires étrangères, la position officielle du gouvernement canadien est que l’occupation israélienne des territoires occupés de la Palestine est illégale, parce qu’illégale selon la loi internationale. Mais quand vient le temps de voter aux Nations-Unies, par exemple sur le mur d’apartheid qui a été dénoncé parune centaine de pays, le Canada s’est abstenu. C’est de la lâcheté. Le Canada a trop peur de faire face à un certain lobby puissant.»

Les médias, particulièrement francophones, ont très bien couvert les actions de l’AJCO et du PaJu. « C’était la première fois qu’ils voyaient des Juifs rapporter les agissements de l’État d’Israël contre le peuple palestinien et faire une critique systématique et analytique du sionisme ». Depuis l’attaque du World Trade Center, il y a un « resserrement incontestable » de ce que l’information présente au public, résultat du travail des lobbies intéressés. C’est d’ailleurs là, me dit Bruce, toute l’importance des médias comme le Bulletin du Centre. C’est par eux désormais que la population peut avoir véritablement accès à ce qui se passe concrètement autour de nous. « Parlez des enjeux du Moyen-Orient pour qu’il n’y ait pas un monopole de l’information donnée par des organisations comme Bnai Brith et le Congrès juif depuis trop longtemps. »

La vigile hebdomadaire a lieu de 12 h à 13 h au coin de Peel et René-Lévesque, en face du consulat d’Israël. Chaque semaine, on y remet un nouveau tract d’information. Notons que des contre-manifestants s’y présentent régulièrement. Ils viennent surtout apparemment de communautés blanches fondamentalistes.

Suggestions de lecture : Simha Flapan ; Zeev Sternhell
Plus d’info. : www.paju [à voir] ;
www.letransgresseur
[à voir]