Pour chacun de nous une église restera toujours un puissant symbole de vie en communauté. Personne ne peut rester indifférent au sort que subissent un grand nombre de ces majestueux bâtiments. Ces réalisations de nos ancêtres constitueront l’essentiel du patrimoine touristique de nos enfants. En ce lieu, une parcelle de nos vies s’est ancrée. Nous n’y pouvons rien, on y retrouve pour le meilleur ou pour le pire d’importantes parcelles de souvenirs.
Relancer des actions collectives.
Nous savons tous que la lutte aux bouleversements climatiques doit reprendre rapidement. La mobilisation doit se construire autour de projets qui transformeront les grands enjeux abstraits associés au climat du globe. Les gens doivent voir la lutte comme un enjeu de proximité, associé directement à leur communauté, et ce partout sur l’étendue du territoire.
Pour éviter le découragement périodique typique des grandes mobilisations, il est important que tous sachent que nous œuvrons à un projet commun, pertinent partout, ou que l’on soit sur le vaste territoire du Québec. Depuis plusieurs mois maintenant des militants, élaborent en lien avec les spécialistes du patrimoine religieux un projet de mobilisation citoyenne permettant à toutes les communautés de passer à l’action. Celui-ci émerge, et nous sommes au moment d’en partager les grandes lignes.
En cette période caniculaire, de sécheresse et de fin de cycle pandémique, nous savons maintenant que la protection des personnes vulnérables face aux chocs environnementaux récurrents le défi des années à venir. Nous aurons besoin de lieux physiques pour protéger les gens exposés. Nos communautés devront faire face aux crises qui se multiplient et assurer leur résilience. Nous avons ici des assises importantes pour les rendez-vous électoraux qui s’annoncent dans les prochains mois; au municipal, au fédéral et sous peu au provincial.
Des espaces en mal de vocation adaptée:
Partout, dans chacun de nos quartiers et villages, il y a une église. Ces bâtiments sont nombreux à être en mal de vocation. Certains sont même laissés à l’abandon. Pourtant ces vastes espaces de patrimoine bâti grâce aux dons de nos ancêtre sont des lieux idéaux pour servir de refuge et d’espace facilitant la résilience. Plusieurs hébergent déjà des services d’aide aux communauté locales, des salles polyvalentes, des cuisines communautaires et des locaux d’organismes. Mais il faut faire plus, s’assurer que la pérennité de ces bâtiments soit assurée, en offrant des services essentiels.
Nos travaux mobilisent présentement plusieurs intervenants clés des milieux religieux, de la sauvegarde du patrimoine bâti, et une firme d’architecte spécialisée dans la conversion des églises. Basé sur les travaux de nombreux groupes de travail, plusieurs vocations nouvelles émergent. L’équipe a identifié et évaluera au cours de l’été 2021 la faisabilité de six vocations indispensables pour permettre aux membres de nos communautés de faire face aux crises. Ces vocations qui sont complémentaires aux usages actuellement les plus répandus. Ces nouveaux usages complètent bien la conversion d’églises en salles communautaires polyvalentes, en salles de spectacle ou en site d’activités sportives. Ces vocations sont celles que nous jugeons prioritaires pour faire face aux crises ou pour faciliter la résilience des communautés. Ces vocations visent à répondre à des besoins urgents, qui permettront aux autorités locales et aux Ministères concernés de s’engager de façon immédiate dans les projets de conversion. Ces vocations peuvent être combinées, mais il faut agir rapidement et de façon concertée…
Vocations à l’étude pour nos églises.
• Le sanatorium temporaire ;
La crise pandémique nous a montré la nécessité d’avoir accès à des lieux de distanciation physique, mais plus encore. On doit penser au sanatorium temporaire, une installation qui sera composée de pièces à pression négative pour isoler et traiter des personnes infectées. Ce style d’espace en version gonflable a été installé dans une aréna de Verdun par la Croix-Rouge lors de la première vague de pandémie. On pourra utiliser ces sites pour installer des sites de prélèvement, des sites de vaccination, et des lieux de distanciation pour nos services publics. On a qu’à penser aux besoins de nos services de garde, de nos les écoles, des centres jeunesses, et divers types de lieux d’hébergement pour s’en convaincre. Ces lieux devront être équipés pour entreposer le matériel médical indispensable pour répondre aux crises. De tels lieux sont dorénavant critiques pour chacune de nos communautés pour éviter un autre désastre sanitaire décimant les gens les plus vulnérables.
• Le refuge communautaire sécuritaire ;
Les crises récurrentes apporteront leur lot de cataclysmes et d’aléas destructeurs. Nous pouvons prévoir les besoins en termes de refuges dans nos communautés. Des refuges thermiques et hydriques, permettant aux gens de se protéger de canicules, de pénurie d’eau et de sécheresses mortelles. Des sites qui sont autonomes en production électrique renouvelable, permettant en cas de panne énergétique prolongée de se protéger du froid comme ce fut le cas lors de la crise du verglas. Ces lieux peuvent aussi s’avérer indispensables advenant le cas où l’eau potable se retrouve indisponible ou gravement contaminée; entre autres par la fuite d’un pipeline dans le fleuve. Et que dire de la protection en situation de méga-incendies forestiers de plus en plus fréquents, ou de l’arrivée d’un grand nombre de déplacés climatiques. Le bâtiment doit avoir les équipements sanitaires, thermiques et d’approvisionnement en eau douce nécessaires à l’hébergement de moyenne durée (plusieurs semaines) pour un bon nombre de personnes de la communauté avironnant.
• Le pôle agroalimentaire ;
Nous avons tous constaté que les probabilités de bris dans les chaînes d’approvisionnement alimentaire sont très élevées et de sources multiples. Sécheresses prolongées, neutralisation des services ferroviaires, aléas climatiques dans les lieux de production, crises sanitaires, grèves de travailleurs pour des fonctions névralgiques; et ce n’est qu’un début. On parle de plus en plus d’autonomie alimentaire et de production alimentaire de proximité pour garantir une résilience. Cet enjeu est de plus en plus criant dans les communautés riveraines menacées par l’érosion rapide des berges détruisant les voies de transport. Le pôle agro-alimentaire de proximité, offrant des services indispensables aux petits producteurs locaux est devenu une nécessité. Il fournit des services de stockage, de réfrigération et parfois de congélation. Des cuisines de transformation aux normes, à des fins de conservation des végétaux et parfois de la chair animale sont disponibles tant pour les producteurs que pour des services de cuisine collective. Le pôle peut permettre la prolongation du marché public à l’année grâce à un point de vente. On peut y greffer des serres, des jardins communautaires éducatifs, et des banques de partage de semences. Certaines églises sont même devenues des sites de production verticale de légumes.
• La production électrique par des énergies durables ;
Peu importe la vocation, ou les vocations qu’on envisage greffer à ces salles polyvalentes, on doit voir à l’autonomie énergétique du site. La boucle géothermique communautaire permettant de puiser la chaleur du sol et de la distribuer à divers bâtiments communautaire devient indispensable. Il faut en premier lieu garder l’opération des sites abordables. Cette boucle peut en hiver chauffer l’église, l’école de village ou de quartier, le presbytère, l’ancien couvent et des serres communautaires; puis en été devenir un activateur pour la production de gaz naturel renouvelable (GNR) à partir des déchets organiques du secteur. Combiné à l’énergie solaire, et aux autres avenues énergétiques renouvelables comme l’éolien, l’énergie marémotrice et les micro turbines en rivière; l’autonomie énergétique du site en hiver est faisable. Et comme c’est le cas pour toutes les pompes à chaleur, la géothermie offre en prime, la climatisation des lieux en été. Dans plusieurs communautés, les paroisses et municipalités sont propriétaires d’importantes superficies de terrain, l’occasion pour des parcs éoliens et solaires sont bonnes.
• La gare intermodale électrique ;
Le virage du transport tout électrique doit être pris rapidement. On doit voir émerger rapidement des stations de services électriques. On parle ici de véritable gare avec tous les équipements nécessaires à la recharge des véhicules, de l’autobus, au vélo; en passant par les automobiles, les voiturettes de golf et les utilitaires sports. Vous avez besoin d’une recharge, vous cherchez l’église, et dans le stationnement vous trouverez votre borne, et une variété de véhicule en partage pour votre période de recharge. Votre église est le lieu idéal. Son site est généralement bien situé, près des services et au cœur de nos quartiers et villages. De plus le bâtiment a presque toujours un stationnement sous utilisé. C’est idéal pour en faire une véritable gare intermodale. Un partenariat paroisse et municipalités doit être établi. Les municipalités ont déjà, via la Fédération Canadienne des Municipalités, accès à du financement pour des véhicules en partage, et l’installation de bornes électriques. Exceptionnellement nécessaire, cette lubie généralisée et destructrice des véhicules utilitaires sports et des camionnettes individuelles de tout genre doit cesser. La solution passe par l’offre de ces véhicules, en partage, électriques et disponible pour les usages occasionnels. La gare intermodale électrique sera une composante importante de la diminution des GES dans le transport au Québec.
• Le centre de télétravail.
Nombreux sommes-nous en période de pandémie à avoir vécu le télétravail, et ainsi avoir réduit un grand nombre de nos déplacements superflus. Le télétravail a ses avantages incontestables dans la gestion de notre temps et la réduction des GES. Mais le télétravail à la maison a ses inconvénients au niveau des relations sociales et professionnelles qui sont importantes pour notre développement individuel et professionnel. Les Centres de télétravail de proximité sont une solution permettant de tracer une ligne entre la maison et le lieu de travail. Au lieu de rester à la maison, il est envisageable de se déplacer dans un lieu de proximité qui regroupe tous les services nécessaires pour le travail de bureau. Le Centre peut offrir toute une gamme de services aux travailleurs dont les employeurs louent des espaces de travail: une réception, des salles de réunion et téléconférence, une connexion rapide, des postes de bureautique performants et les services d’infographie et de reprographie. Ainsi le télétravailleur côtoie des gens de sa communauté oeuvrant dans divers secteurs et bénéficie de tous les avantages d’une présence au bureau; tout en restant près de chez lui. Les voies existent donc pour rendre le télétravail plus social.
Le défi à relever.
Nos bâtiments religieux ont écrit de grands pans de notre histoire collective. Ils représentent l’engagement de nos ancêtres envers leur communauté et ont été le site de nombreux rites de passage auxquels un grand nombre de Québécoises et les Québécois sont attachés. Dans plusieurs contexte les églises ont été un lieu de refuge et elles ont facilité la résilience des communautés en situation d’adversité.
L’engagement envers les gens vulnérables est porteur, et la sauvegarde de ce patrimoine interpelle une majorité des citoyens. Cette avenue de mobilisation est possible, car elle est concrète. Elle peut réellement mettre en valeur nos richesses du patrimoine bâti, pour des services dorénavant essentiels à nos communautés. Jamais l’adage « d’une pierre, deux coups » n’aura été aussi porteur d’avenir.
D’ici peu, suite à l’évaluation de faisabilité, nous aurons entre les mains une incroyable opportunité de mobilisation pour la suite de la lutte aux bouleversements climatiques qui inévitablement s’intensifieront.
Normand Beaudet
Centre de ressources sur la non-violence