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Des mobilisations étudiantes contre les recherches militaires

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Écrit par www.AntiRecrutement.info

Voici quelques exemples de campagnes étudiantes menées au Canada contre les recherches universitaires au profit de l’armée dans certains établissements.

UNIVERSITÉ DE TORONTO
En septembre 2004, il a été publiquement annoncé qu’une entreprise militaire, Atlantis Systems International, allait devenir un partenaire dans un projet de recherche déjà en cours à l’Institut ontarien des sciences de l’éducation (OISE)

Manifestation PAMO à OISE, 1er janvier 2005. (Photo: John Bon)
Manifestation PAMO à OISE, 1er janvier 2005. (Photo: John Bon)

C’était la première fois qu’il allait y avoir une recherche à caractère militaire à OISE, ce qui a provoqué une forte opposition étudiante. Ceux-ci se sont mobilisés à travers le groupe People Against the Militarization of OISE. Les actions de ce groupe ont rapidement eu un impact important sur le programme de partenariat de recherche. En raison de cette mobilisation étudiante, le partenariat de recherche fut suspendu à la mi-décembre 2004. En plus, cette suspension s’inscrivait dans le cadre d’un moratoire sur les partenariats de recherche à caractère militaire qui devait durer jusqu’à ce qu’une politique à cet effet soit adoptée. Un sous comité relevant de l’administration d’OISE a été formé pour explorer les différentes options qui pourraient y mener.

Toutefois, l’administration a continué de défendre le partenariat de recherche en question et a même déclaré qu’il allait se poursuivre car il n’impliquait aucune violation de politiques déjà existantes à cette l’université. Les étudiants ont alors poursuivi leur campagne et ont notamment organisé une manifestation en janvier 2005. Ils ont reçu l’appui de différents syndicats et politiciens locaux et ont même porté plainte auprès de la Commission de la concurrence ontarienne contre Atlantis Systems International en raison d’un potentiel conflit d’intérêts.

En septembre 2005, un comité de l’administration d’OISE a publié un rapport quant aux politiques de partenariat de recherche, recommandant qu’il soit demandé à l’Université de Toronto (ce dont dépend OISE) d’entamer un processus de révision de ces partenariats.

Malgré le fait qu’à l’heure actuelle, trois ans plus tard, il n’y ait aucune nouvelle politique de recherche qui ait été adoptée, le controversé partenariat de recherche n’a pas été poursuivi depuis sa suspension. Les étudiants d’OISE sont clairement ressortis victorieux de leur campagne pour prévenir la militarisation de leur institut !

L’UNIVERSITÉ DE L’OUEST DE L’ONTARIO (LONDON)

Stryker. (Photo: domaine public)
Stryker. (Photo: domaine public)

En 2004 il a été annoncé à cette université que la faculté de génie allait entamer un contrat de quatre ans avec l’entreprise militaire General Dynamics pour effectuer des recherches visant à améliorer le blindage des véhicules blindés légers de type Stryker. Ce véhicule est principalement utilisé par les soldats américains en Irak, mais il l’est également par les troupes canadiennes en Afghanistan.

Discussion Counter-Stryker UWO, London Ontario, 2008. (Image: domaine public)
Discussion Counter-Stryker UWO, London Ontario, 2008. (Image: domaine public)

En 2006 s’est formé le groupe Counter-Stryker en opposition à cet important contrat militaire, ainsi qu’à l’influence croissante qu’exercent l’armée et l’industrie privé à l’université. Au printemps 2007, un enseignant actif dans ce groupe a fait une présentation devant le Conseil de recherche académique de l’université leur demandant d’effectuer une évaluation éthique de la recherche militaire au sein de l’institution. Le conseil a refusé cette demande en utilisant le prétexte qu’effectuer une telle évaluation serait prématurée sans l’existence d’un code d’éthique national pour l’encadrement de recherche militaire. Il a plutôt recommandé que le vice président à la recherche soulève l’enjeu auprès du Conseil ontarien de recherche académique et auprès de son homologue au sein du groupe canadien d’université de recherche G-13. Les réponses des deux associations ont été de rejeter tout encadrement éthique des recherches militaires, prétendument parce que cela serait impossible à accomplir sans affecter le principe de liberté académique.

À travers le pays, des enseignants, des employés et des étudiants revendiquent que la recherche universitaire soit menée de façon éthique, alors que les administrations défendent ardemment la militarisation. La lutte est bien commencée, et elle se poursuit.

UNIVERSITÉ MCGILL
En Octobre 1984 le journal McGill Daily a rapporté que deux professeurs de génie de McGill recevaient du financement de la part de l’armée de l’air américaine et du département canadien de la défense pour des recherches sur les explosifs air-carburant. Cette recherche militaire était particulièrement controversée parce que ce type d’explosifs venait d’être inventé durant la guerre du Vietnam et était alors considéré comme étant une arme inhumaine de destruction. En réaction à cette découverte des recherches sur les explosifs air-carburant se déroulant à l’université, un comité d’opposition a été formé. La campagne, visant à mettre un terme à ces recherches, a atteint son apogée en 1987 lors d’une occupation d’une durée de six jours au bureau du vice-recteur à la recherche. L’action ne s’est terminée qu’au moment où l’administration de l’université a finalement décidé de faire appel à la police pour déloger les manifestants.

Suite aux pressions de la campagne étudiante, le sénat de l’université a décidé en 1988 d’apporter de modifications aux politiques de réglementation de la recherche. Ces changements ont permis de rendre la recherche militaire davantage transparente. Ceux-ci obligeaient également les professeurs à fournir une évaluation éthique sur la totalité de leurs projets impliquant du financement d’origine militaire. Toutefois, cette victoire s’est avérée mitigée. En fait, les politiques ont été critiquées à l’époque comme étant inefficaces car il n’y avait aucun mécanisme de vérification l’accompagnant. En substance, les nouvelles politiques se contentaient d’imposer aux chercheurs d’assurer eux-mêmes l’intégrité et l’aspect éthique de leur recherche. Également, elles n’étaient pas applicables rétroactivement en ce qui concerne les contrats de recherche sur les explosifs qui étaient en cours à l’époque

(Photo: inconnu)
(Photo: inconnu)

En janvier 2007, le journal McGill Daily rapportait qu’une nouvelle génération de professeurs effectue des recherches relativement au développement d’explosifs militaires dans le département de génie mécanique de l’université. Ces projets de recherches étaient en fait la continuité de la tradition de recherches militaires à McGill qui a débuté au cours des années 1970. Dorénavant, les explosifs sont nommés thermobariques plutôt que air-carburant; ce n’est qu’une nouvelle génération encore plus destructive de la même technologie. Le retour aux recherches visant à développer ce type d’armement était devenu nécessaire car il est bien adapté à être utilisé dans le cadre des guerres en Afghanistan et en Iraq.

De nos jours, malgré le fait que les chercheurs ne soient pas directement financés par l‘armée américaine, la recherche s’effectue toujours en partenariat avec des employés de l’armée américaine et se déroule selon leurs exigences. Reprenant la lutte qui avait débuté plus de vingt ans auparavant, les étudiants ont à nouveau lancé une campagne pour mettre un terme aux activités militaires dans leur université; Demilitarize McGill.