Écrit par Alexandre Vidal
Nul besoin de survoler longtemps un journal pour constater que notre société est empreinte de violence. Nous sommes régulièrement appelés à compatir au rapatriement de cercueils de jeunes québécois qui ont laissé leur vie en Afghanistan; des témoignages sur la violence des gangs de rues dans les quartiers défavorisés de multiples villes nous rejoignent quotidiennement.
Les exemples de drames humains engendrés par une violence aussi tragique qu’inutile ne manquent pas. L’urgence d’établir dans nos communautés une véritable culture de paix n’est plus à prouver. Mais comment y arriver ?
Il ne suffit pas d’implanter une plus grande présence des policiers dans nos rues pour régler la violence des gangs de rues. De même, tout n’est pas de déployer le plus grand nombre de soldats si l’on veut réduire les conflits armés outre mer.
Malheureusement, les gouvernements des pays dits « civilisés » persistent à nous présenter comme incontournables les politiques de la force. On n’a qu’à penser au plan Harper pour réprimer la délinquance juvénile, à celui du maire Tremblay face aux gangs de rue ou au « plan d’action de lutte à la pauvreté » du ministre québécois de l’emploi et de la solidarité sociale, Sam Hamad. Selon ce ministre, la consultation des citoyens et du milieu communautaire est au cœur de ce plan d’action. Il a même commandé la tenue du Rendez-vous de la solidarité 2009 au début de l’été, un événement auquel étaient invités les représentants de nombreuses organisations communautaires. Or, cet événement ne fut qu’une parodie de consultation, puisque les besoins exprimés par les groupes communautaires n’ont aucunement été pris en compte:
-La reconnaissance de la pauvreté et de l’exclusion sociale en tant que violation des droits citoyens ;
-la mise de l’avant de la redistribution des richesses comme moyen privilégié de lutte à la pauvreté ;
-l’engagement quant à l’implantation de mesures pour que les politiques publiques soient à l’abri de l’influence des organisations philanthropiques ;
-la démonstration d’une ouverture réelle par l’adoption de mesures concrètes et précises pour lutter contre la pauvreté.
Pour le ministre Hamad, l’événement représentait une possibilité « d’ouvrir un espace de discussion positif et enrichissant ». Du point de vue des groupes ayant participé à la consultation, la rencontre visait plutôt « à donner de la légitimité à un plan de lutte qui ne reconnaît pas les droits des personnes en situation de pauvreté, selon un processus de consultation biaisé qui ne tient pas compte des revendications du milieu communautaire. »
Au final, le nouveau plan d’action contre la pauvreté semble orienté avant tout vers les intérêts du patronat et de ceux qui croient que l’on devrait limiter le modèle de redistribution des richesses dont s’est doté notre société. Le résultat ne peut être que l’effritement croissant des conditions des travailleurs à faible revenu et des assistés sociaux.
Plutôt que d’investir dans les services sociaux pour lutter contre la pauvreté, le désarroi et la violence qu’elle peut engendrer, nos dirigeants y font des coupures majeures pour canaliser nos ressources vers la répression. On en est rendu à un point où on tente de « nettoyer » nos centres-villes de l’itinérance en chassant les sans abris à coup de contraventions et de détentions reposant sur des motifs bidons qui violent la dignité humaine. Éliminer les pauvres, voilà une curieuse façon d’éliminer la pauvreté…
L’équation à considérer est pourtant bien simple. Le désespoir entraîne l’utilisation des moyens du désespoir. Alimenter la précarité n’est certainement pas un moyen efficace pour contrer la violence.