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En réponse à votre lettre M. Gagliardi …

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Bonjour Monsieur Gagliardi,

Milles excuses de vous avoir blessé, et de nombreux membres d’un mouvement que vous chérissez beaucoup.

J’ai lu avec grande attention votre texte, que de souvenirs! Je me décide à vous écrire en espérant avoir un interlocuteur respectueux. Votre témoignage est intéressant et vous serez surpris du fait que je suis d’accord sur l’essentiel de vos propos. Votre note est respectueuse, elle est identifiée et je sens une sincérité unique dans le flot de messages reçus.

Je n’ai pas apprécié les allusions à mon ignorance, surtout dans la lettre du Devoir, avant hier.

Pour préciser les choses, contrairement à ce que les gens croient, je connais bien le mouvement des cadets, j’y ai rencontré ma femme et nous sommes ensemble depuis. J’ai été instructeur civil d’escalade sur la base de Whitehorse au Yukon au début des années 80. Camps de deux semaines, six semaines, cours de cadet instructeur, j’ai tout fait ça, et ma conjointe aussi.

J’ai donc une bonne estime pour l’organisme que l’armée canadienne instrumentalise présentement, à des fins idéologiques et politiques. Aussi difficile que ce constat soit pour vous et les autres ex-cadets, je me sentais un devoir d’écrire ce texte. Pourquoi?

Contrairement à vous, un grand nombre des jeunes que j’ai côtoyé dans mon corps de cadet, dans les années 70, ont joint les Forces canadiennes, parfois avec de bien tristes conséquences (syndrome du stress post-traumatique). En fait, avec ma conjointe, contrairement à vous, nous avons de la difficulté à identifier nos amis des cadets qui n’ont pas fait un certain temps dans les Forces. Selon notre estimation, il s’agit d’au moins 50 % de nos connaissances qui se sont retrouvés dans cette situation. Bien entendu, tous n’ont pas fait une carrière. Ces gens, souvent moins favorisés, ont bel et bien été endoctrinés par des membres de la réserve (pas du CIC) dès l’âge de 12 ou 13 ans. Dans ce temps, ce qui me console, c’était les missions multilatérales de paix de l’ONU. Ce n’est plus le cas maintenant avec les entreprises offensives de l’OTAN.

Le respect que j’ai pour mes amis militaires et des membres de ma famille, est de m’assurer que, quand on les envois en mission de combat (tuer ou se faire tuer), c’est pour une bonne raison. Jouer au chien de poche pour le positionnement économique et géostratégique américain au coeur du BRIC (Russie, Inde, Chine) n’est pas une bonne raison. En tout cas pas pour envoyer un membre de ma famille au combat, désolé. Je me croise les doigts. Plusieurs de mes connaissances militaires sont entièrement d’accord sur ces faits.

Oui, j’ai vécu de bons moments dans les cadets, comme n’importe quel jeune le ferait dans un mouvement jeunesse civile qui recevrait plus de 150 000 000 $ par année, je pense que c’est plus près de 165 millions par année du gouvernement fédéral. Imaginez un mouvement scout, un réseau de maisons de jeunes, un regroupement comme les 4H, le mouvement  environnement Jeunesse ou Jeunesse Canada Monde ayant accès à cette manne financière. Effectivement, l’expérience de vie des jeunes serait exceptionnelle, véritablement enrichissantes comme nous pouvons en témoignez. Croyez-moi, je n’ai rien contre les mouvements jeunesses qui sont au coeur d’une démarche de prévention de la violence sociale. Quand je vois mes enfants se démener dans le mouvement « scout » pour se payer l’essentiel, puis je vois les cadets leur faire compétition pour du luxe, je fulmine!

Mouvement civile vous dites! La ligue des cadets est en bonne partie financée par les Forces canadiennes. Elle ne distribue tout au plus quelques millions au mouvement. Cette composante civile, comme vous la qualifiez, ne compte pas pour grand chose dans le financement global de ce mouvement militaire. Je crois simplement qu’il est urgent, en temps de guerre, que le mouvement des cadets qui est un mouvement jeunesse privilégié, soit démilitarisé. Qu’on transfert les fonds au Ministère du Patrimoine et qu’on élimine la formation militaire. Point à la ligne.

Ainsi, les Forces armées canadienne, obéissant servilement à un gouvernement conservateur minoritaire, ne seront pas tenté de recruter activement dans ce milieu vulnérable.

Pour la formation des jeunes vous soulignez:

Exercice militaire: Plus précisément la « drill », pour moi, le conditionnement à l’obéissance au doigt et à l’oeil.

Formation élémentaire: En d’autres mots, en ce qui me concerne, l’éducation à la structure hiérarchique et au fonctionnement des Forces Canadienne si ma mémoire est bonne.

Entraînement aventurier: Mises en scène de situation de vie communautaire en forêt avec les équipements de combat, les rations et familiarisation avec toute la logistique de campagne militaire! Du plein air, vous dites???? Moi aussi j’étais instructeur de cette activité, spécialiste en survie…

Carte et boussole: Utile, j’en conviens,  mais fondamental pour le militaire au combat.

Adresse au tir: Sans commentaires, dans mon temps c’était la FN-C1, une arme de combat belge.

Art oratoire: Ça, je ne me rappel pas… Désolé!

Art du commandement: Petit officier 101. Pour ceux qui voudraient joindre le Collège militaire et le cours d’officier.

Citoyenneté: Encore une fois, j’ai de vagues souvenirs.

Conditionnement physique: Appelé affectueusement, dans mon temps, le PT, qui était souvent la forme de punition pour les non-conformistes.

Vous voyez, il y a toujours plusieurs façons de voir les choses.

Le problème, en général, avec les Forces canadiennes, ce n’est pas ce que l’on dit; c’est ce que l’on ne dit pas.

Oui! Je veux bien entamer un dialogue. J’espère que le flot incessant de bêtises va cesser. Merci d’avoir avisé les gens que ça ne donne rien.

Normand Beaudet