Écrit par Normand Beaudet
Les termes « responsabilité de protéger », « droit d’ingérence humanitaire », « devoir d’assistance aux populations », « nécessité d’ingérence » sont de plus en plus populaires. Représentants de gouvernements, militaires et politiciens de tout acabit semblent prompts à adhérer à ce nouvel humanisme institutionnel. À l’ère de la guerre au terrorisme, où l’on perçoit partout la menace, cet enjouement pour le bien-être des peuples semble bien suspect.
En fait, la question est de savoir à l’intervention de qui ces beaux principes font appel et comment il faut intervenir. Il s’agit sans doute, presque toujours, d’un appel à l’intervention militaire d’un État ou des groupes politiques armés à l’intérieur d’un autre État pour des fins autres qu’humanitaires.
Pour nos États, le déploiement militaire constitue l’unique vrai moyen d’intervenir dans une situation de conflit. Et puisqu’il y aura toujours des conflits, l’armée devient le seul outil à aiguiser, entretenir.On l’équipe, l’entraîne pour l’apprêter à intervenir. Mais comme elle coûte cher, on se doit de l’utiliser lorsque la situation humanitaire le justifie : il faut attendre qu’il y ait crises graves impliquant la mort massive de populations, c’est-à-dire assez de morts pour justifier auprès des contribuables des campagnes militaires pourtant préparées d’avance. C’est la logique dans laquelle s’inscrit la pensée de nos politiciens.
Nous avons décidé, dans ce numéro, de parler d’interventions civiles dont l’existence est due à l’esprit innovateur des organismes non-gouvernementaux. Elles s’opèrent en situation de crise, avec très peu de moyens et dans des contextes de violation des droits de la personne.
Les cas cités en exemples n’évoquent pas des tragédies humaines à grande échelle, mais il s’agit des expériences dont on apprend beaucoup concernant les avenues possibles d’intervention, de détection et de prévention de conflits nternationaux.
L’intervention humanitaire s’intéresse aux victimes d’un conflit. Peu importe l’intention déclarée, cette voie, impliquant toujours les États, reste dangereuse car elle cache trop souvent une politique interventionniste et la délicate ingérence pour des fins économiques.
L’intervention civile par contre s’intéresse aux acteurs du conflit; elle anticipe, cherche à désamorcer les hostilités. Et l’on gagne aujourd’hui à se demander comment pousser plus loin son action.