Une préoccupation de plus en plus présente.
Pour quiconque trouve sensés les principes et les valeurs de non-violence, il y a urgence à se prononcer face aux multiples pressions sur les milieux politiques en lien avec les droits des animaux. Personne n’ignore à quel point la question de droits des animaux est devenue sensible.
L’interpellation vient aussi bien de la population qui affectionne les animaux de compagnie, des militantEs pour la protection de l’environnement que de mouvements opposés à la consommation de la viande et/ou des sous-produits animaliers (groupes véganes, végétaliens et végétariens).
Comment percevoir la sympathie montante pour les droits des animaux? Où trouver l’inspiration pour fonder une législation qui soit le reflet de notre meilleur rapport aux animaux et notre croyance dans la non-violence ?
Grande émergence d’une dynamique
Depuis plusieurs années, la production des animaux de ferme fait l’objet de nombreuses critiques. Des informations sont relayées en différents milieux faisant le lien entre la production animalière et les émissions de gaz à effet de serre. C’est ainsi que se multiplient les groupes de personnes qui, dans l’espoir de contribuer à réduire l’impact de cette industrie sur l’environnement, sur les animaux et sur la santé humaine, refusent de consommer tout produit d’origine animale.
Mais aussi, la question se pose aujourd’hui en termes de droits des animaux. Ce qui mobilise de jeunes militants anti-spécistes de plus en plus nombreux. Puisque pour la majorité de ces jeunes militants, c’est par spécisme, une forme d’auto-priorisation basée sur des croyances irrationnelles, que les humains relèguent à un plan servile les autres animaux ou les excluent de leur cercle de vie. De leur point de vue, il n’y a aucune justification morale à infliger de la douleur à un être qui ressent de la douleur, aucune justification pour asservir quelqu’un qui veut être libre ou pour tuer quelqu’un qui veut vivre. Or, soutiennent-ils, « nous savons maintenant que d’autres animaux pensent …, peuvent ressentir de la douleur et souffrir comme nous.» Le spécisme représente à leurs yeux une forme d’oppression à l’égard des autres animaux qu’il s’agit de combattre.
La campagne ANIMAL, déclenchée en août dernier par la Société pour la prévention de la cruauté envers les animaux (SPCA) exige du gouvernement du Québec qu’il encadre le traitement des animaux de ferme. Dans son communiqué de presse se dégage une préoccupation majeure qui justifie la campagne : «Malgré l’adoption d’un nouveau cadre juridique censé protéger tous les animaux, ceux d’entre eux qui sont destinés à la consommation demeurent exclus des principales protections qu’offre la loi. C’est pour cela que plusieurs pratiques cruelles –comme la castration à froid des veaux et des agneaux, sans aucune anesthésie ni analgésique –ont cours de façon routinière sur les fermes. Ces mêmes pratiques seraient pourtant illégales si des chiens ou des chats y étaient soumis. »
Me Sophie Gaillard, directrice de la défense des animaux à la SPCA de Montréal explique que la législation québécoise en matière de bien-être des animaux n’inclut pas dans son champ d’application le domaine de l’agriculture et de l’élevage. La législation évoque seulement l’acceptabilité des pratiques agricoles si elles se font selon « les règles généralement reconnues ». Or, ces règles ne sont définies par aucune loi. Ce qui veut dire que l’industrie a le pouvoir de définir ce qui est légal et ce qui ne l’est pas.
Puiser dans les expériences du passé?
Ces débats ne peuvent se conclure de la meilleure façon en s’en tenant à une seule orientation éthique. Prendre conscience du fait que l’enjeu est aussi vieux que l’humanité, c’est déjà saisir la délicatesse du problème, être disposé à interroger l’histoire et les enseignements de traditions diverses pour faire face à la violence en général quel que soit le règne qui doit la subir.
Dans de nombreuses traditions, il existe une conception de la vie et une éthique pour faire en sorte que la force ne soit jamais qu’un dernier recours, que les abus divers soient prévenus.
Selon une idée ancienne du Jahinisme, une tradition qui remonte au 9e siècle avant JC, « toutes les vies sont interdépendantes et donc se doivent un mutuel respect, une mutuelle assistance ». L’emblème du jaïnisme est la paume de main symbolisant le réconfort moral et la compassion dans laquelle est inscrit Ahimsa c’est-à-dire la non-violence. Selon un des cinq vœux principaux du Jahinisme , il est prescrit de ne pas exercer de violence sur les êtres vivants et de toujours agir avec compassion.
Par ailleurs, même si cela a dû prendre du temps, les scientifiques ont confirmé ce que les cultures autochtones enseignent depuis des siècles : toutes les formes de vie sont connectées de manière vitale. Enlever même un brin de la toile de la vie produit une vague de catastrophe grandissante. Les premiers de la Terre ont vite compris que nous ne pouvons jamais être des humains en bonne santé, des humains que nous sommes censés être dans un monde sans désert, sans air pur et hurlements de loups sous la lune.
Les mouvements environnementalistes du début des années 1990, notamment avec le mouvement « Earth First », nous ont également interpellés. Ils préconisaient non seulement une défense collective et sans compromis de la Terre Mère mais aussi le respect de toute forme de vie : Les activités humaines – de la chasse à la destruction de l’habitat – ont déjà conduit à l’extinction d’innombrables espèces et le processus ne fait que s’accélérer.
Rechercher dans ces diverses traditions la manière dont chacune répond aux questions précises concernant l’utilité mutuelle entre les espèces en respectant ces principes communs de respect de la Terre et des espèces qui y vivent, voilà un travail qui attend ceux et celles qui travaillent à la promotion de la non-violence.