Qui la protège?
Au moment où débutent les audiences du BAPE sur le projet Energie Est, une réflexion s’impose. Lorsqu’on ouvre le robinet, on ne se pose pas de questions. L’eau devrait être potable. Tant que le traitement de l’eau de votre municipalité est adapté à la source d’approvisionnement de départ, il n’y a pas de question à se poser. Mais qu’est ce qui arrive lorsque la source d’eau change? Lorsque de nouveaux contaminants risquent de modifier la composition de votre eau comme c’est le cas avec les nouveaux pipelines? A ce moment, tout change!
62 piscines hors terre de bitumineux par heure.
Déjà, l’Office national de l’énergie (ONÉ) et la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) ont autorisé l’entreprise Enbridge à inverser le flux du pipeline 9B et d’y faire circuler du pétrole bitumineux. Depuis novembre dernier, la vieille canalisation construite en 1975 pourra faire circuler à terme 300 000 barils soupe bitumineuse; 45,3 millions de litres par jour. Ce pétrole brut provenant des sables bitumineux de l’Alberta, dilué par avec des produits chimique est particulièrement toxique. Pour apprécier le volume dont il est questions, c’est 1 500 piscines hors terre de poison par jour, 62 piscines et demi de bitumineux circulant au fond du fleuve à chaque heure de la journée pour cette première conduite.
A titre d’exemple, Longueuil n’avait déversé que l’équivalent d’une seule piscine hors-terre de diésel volatile dans son eau potable, et ce fut la crise. Dans le cas d’un bris majeur, si Enbridge est particulièrement vigilante et prend 30 minutes à réagir, c’est le volume de plus de 30 piscines hors terre de brut qui s’écouleront dans le Lac des Deux-Montagnes. C’est 900 000 litres dont une bonne portion se déposera au fond du lac, une véritable catastrophe pour la source d’eau du Grand Montréal. Disons que ces chiffres illustrent une situation idéale, car le temps d’intervention pour arrêter une fuite se calcul en heures et en jours si on se fie aux expériences récentes de l’entreprise. Le projet Energie-Est sont on débute l’évaluation ferait circuler quatre fois plus de bitumineux, soit 1100 000 barils par jour, un flot immense de 243 piscines à l’heure.
Mauvaise nouvelle pour nous sous, les pipelines petits et gros se multiplient dans ce secteur. Les menaces à la qualité des cours d’eau juste en amont des sources d’une majorité des municipalités de la grande région de Montréal augmentent en proportion. Cet enchevêtrement de canalisations qui traversent de nombreux cours d’eau qui alimentent ces lacs et sont nos sources constitue déjà une menace importante. On parle en particulier de la rivière des Mille-Îles, la rivière des Prairies de la rivière du Nord et la rivière des Outaouais.
La vieille canalisation de Enbridge elle, est à moins de 25 km en amont des puises d’eau d’une majorité des municipalités du Grand Montréal. La majorité de ces villes puisent leur eau à partir de sources alimentées par le Lac des Deux-Montagnes ou le Lac St-Louis. Nombreuses sont les municipalités qui craignent l’impact dramatique d’un éventuel déversement d’hydrocarbures contaminant cet approvisionnement en eau potable d’une grande qualité. Elles doivent dès maintenant de préparer leurs services de traitement des eaux et de sécurité civile aux frais des contribuables. L’enjeu est actuel et mobilise déjà vos taxes et un nombre croissant d’intervenants régionaux.
CATASTROPHE DE LA RIVIÈRE KALAMAZOO EN 2010, SUR LA LIGNE 4 ENBRIDGE, TOUJOURS EN NETTOYAGE…..
Votre source d’eau potable, la responsabilité de vos maires.
La responsabilité de fournir une eau potable de qualité à la population québécoise repose en premier lieu sur les exploitants des systèmes de distribution. Au Québec, ce sont les municipalités, la province elle, s’occupe des normes. Ceci implique que la tâche numéro 1 de nos maires, qui sont en fait les opérateurs des systèmes d’approvisionnement et de distribution des eaux; c’est le maintien de la qualité de votre source d’approvisionnement. Votre municipalité se doit de protéger votre approvisionnement, et de rejeter une eau usée traitée pour protéger la source d’approvisionnement des autres municipalités. Une grande part des taxes municipales que vous payez doivent servir à ça!
La raison pour protéger votre source d’eau est simple. Toute la chaîne de procédés de traitement qui vous a souvent coûté plusieurs millions en dépend. Les contribuables paient pour avoir une eau potable de qualité au robinet. La chaîne de traitement a été conçue en fonction de la qualité, en fait des contaminants de la source de départ. Si la source change à cause de nouveaux contaminants, la chaîne de traitement n’est plus adaptée et doit être changée ou ajustée; à vos frais. Et ça coûte très cher.
Les barrières de purification ont été conçues en fonction des contaminants existants au moment de la construction des installations. La contamination des eaux de la Grande Région de Montréal par du pétrole brut n’a jamais été un enjeu au moment de construire. Comme citoyen de la très grande région de Montréal, vous devez retenir qu’aucune usine de traitement de votre eau potable n’a été conçue en fonction d’une telle menace.
De plus avec ce type de contamination, il n’y a aucune chance à prendre. Pour de nombreuses raisons l’ajustement à une telle réalité pourrait demander des investissements majeurs en nouveaux protocole de surveillance, formation des opérateurs, équipements et procédés de traitement. Les promoteurs de d’oléoducs sont-ils prêts à payer?
Des conduites d’hydrocarbures qui se multiplient.
Non seulement nous avons d’anciennes conduites de Gaz Naturel et d’huile à chauffage qui traversent près de nos sources d’eau; mais depuis novembre dernier, c’est le bitumineux dilué d’Enbridge, et le comble de l’incurie serait d’y ajouter prochainement l’immense volume de bitumineux de la ligne Energie-Est de Transcanada. L’inquiétude des spécialistes du traitement des eaux est immédiate, et bien réelle.
Pour de multiples raisons, les citoyens devraient être mieux informés des conséquences possibles des décisions de leurs dirigeant locaux, en ce moment les maires. Accepter d’accroître le nombre de canalisations pétrolières traversant le fleuve et les rivières à fort débit près de leurs puises d’eau, et sans imposer au minimum la construction de tunnels isolant les hydrocarbures des sources d’eau est d’une irresponsabilité, et d’une négligence quasi-criminelle. Les citoyens sont face à un dangereux niveau d’irresponsabilité.
Citoyens rappelons-nous que :
1- Au cours des récentes années les municipalités du Québec ont investies des centaines de millions pour mettre à niveau leurs installations d’approvisionnement en eau; le facteur pétrole brut n’a jamais été considéré comme un contaminant possible de nos sources. Cette mise à niveau est en partie désuète avec la ligne 9B, Enbridge et le sera encore plus avec la canalisation deTranscanada.
2- Aucune des usines d’épuration des eaux pour la consommation humaine de la grande région de Montréal n’est conçue ou adaptée pour faire face, et traiter une contamination aux hydrocarbures. Les autorités ne peuvent pas prendre de chances avec ce type de contamination particulièrement menaçante pour la santé humaine.
3- Encore pire, ce type de contamination aux HAP (Hydrocarbures Aromatiques Polycyclique) est particulièrement complexe et la traiter est une science en soit. Aucun opérateur et technicien des eaux au Québec, à part ceux qui ont travaillés dans l’industrie pétrolière, n’est formé pour ce genre de contaminant. On touche à peine la question dans les programmes de formation actuels. Les programmes doivent être adaptés maintenant et de façon urgente.
4- La complexité d’une telle contamination est telle, qu’il n’existe pas de norme pour ces produits dans l’eau potable. La norme en cas de doute pour une eau potable, c’est ZERO. C’est la règle élémentaire de « aucun risque » qui s’applique. Une concentration est détectée, comme on l’a fait à Longueuil, on ferme l’usine de traitement et on attend que les polluants passent, qu’ils disparaissent par dilution jusqu’à devenir indétectables. Dans plusieurs des cas, si par malheur ces produits entrent dans le système de traitement ils peuvent contaminer les systèmes de purification, une situation pouvant impliquer des semaines de nettoyage. Quelle eau boivent les contribuables entre temps?
5- Certains sous-produits du pétrole brut sont solubles dans l’eau et hautement toxique (cancérogène et tératogènes). La chimie des réactions possibles de ces produits avec les produits actuellement utilisés dans le traitement de nos eaux est multiple et complexe. La possibilité de se retrouver avec un système contaminé qui par réaction avec les procédés de traitement actuels (oxydation, biodigestion, ozonation, chloration etc…) génère de nouvelles toxines est élevée.
6- Pour assurer la qualité de votre eau de nombreux protocoles sont imposés aux municipalités; pour surveiller les matières dissoutes, le PH, l’alcalinité, les matières en suspension, la turbidité et les concentrations de toxines. La surveillance des hydrocarbures totaux ne fait pas partie des protocoles surveillance continue, établis et régulier dans vos sources d’eau. C’est le cas dans pratiquement toutes les municipalités, même à la ville de Montréal sous-traite cette fonction peu courante, jugée comme spécialisée. Souvent les entreprises qui ont l’expertise pour effectuer ces contrôles, travaillent aussi pour l’industrie pétrolière.
7- Le gaz naturel des petites canalisations locales est volatile, et à l’huile à chauffage pour l’approvisionnement de quartiers flotte. Par contre, la nouvelle menace des canalisations à très grand débit qui transportent du pétrole non-raffiné c’est importante partie, la composante du bitumineuse dilué par des chimiques coule au fond des cours d’eau. Le poison libère progressivement ses toxines sur de longues périodes de temps. Une soupe mal connue de centaines de toxines solubles dans l’eau dont certaines franchissent les nombreuses étapes de filtration. Suite à un incident, personne ne peut dire pendant combien de temps l’approvisionnement en eau du Grand Montréal devra être fermé.
Les citoyens devraient certainement se préoccuper du fait que nos dirigeants municipaux semblent ignorer cet aspect fondamental de leur fonction. Comment comprendre que les principaux responsables de nos sources d’eau, ne semblent pas conscients des enjeux? Où pire qu’ils ne se soucient pas adéquatement d’une de leur fonction la plus importante? Soit la protection de nos sources d’eau des contaminants pétroliers.
Comme souligné précédemment on prend notre approvisionnement en eau comme un acquis. On ouvre le robinet sans s’interroger. Pourtant la conjoncture pétrolière actuelle devrait forcer les citoyens responsables à insister sur de multiples préoccupations, et à exiger des réponses de nos dirigeants, conseillers et spécialistes municipaux:
Des questions à poser à vos assemblées municipales :
– Sur quelles bases acceptez-vous que des canalisations pétrolières soient construites et exploitées à proximité et en amont des prises d’eau potable des municipalités du Grand Montréal?
– Les hydrocarbures lourds (genre de bitume) qui se déposeraient dans le Lac des Deux-Montagnes et le Lac Saint-Louis à proximité des puises d’eau de la Grande région de Montréal resteraient-ils là longtemps? Combien de temps?
– Certaines des centaines toxines solubles composant le brut représenteraient-elles un danger à long terme pour vos citoyens? Comment se produit l’émission graduelle des produits solubles du bitumineux, que va-t-il arriver de ces produits qui ne flottent pas et ne coulent pas?
– Comment dans notre municipalité, détecte-t-on la présence d’hydrocarbures (HAP) ou (Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques) provenant d’une source d’approvisionnement en eau? Le fait-on? Si non, pourquoi? Quand faites-vous des tests de détection de HAP, à quelle fréquence? Votre spécialiste des eaux sais-t-il ce que sont des HAP?
– Votre ligne actuelle de traitement de l’eau potable peut-elle éliminer les hydrocarbures? Si oui, comment? Puisque peu des 80 municipalités de la CMM le font, est-ce possible dans notre chaîne de traitement partiellement? Ou totalement?
– La décomposition partielle des hydrocarbures, et leur réactions avec les produits de traitement que nous utilisons, peut-elle chimiquement créer de nouvelles toxines dans l’eau potable? Est-il possible que la présence d’hydrocarbures non-traités contamine notre réseau de traitement et d’approvisionnement des résidences? et qu’il nécessite un nettoyage majeur des équipements en cas ?
– Existe-t-il à votre connaissance une valeur d’hydrocarbures, de HAP, acceptable dans l’eau? Quelle est-elle? Comment pouvez-vous vous assurer de la respecter? Si il n’y en a pas, vous devrez fermer l’eau? Combien de temps? Que feront les pompiers?
– Quels procédés devraient être mis en place pour traiter une source d’approvisionnement contaminée aux dérivés toxiques des hydrocarbures dans l’eau que consomment vos citoyens? Des réacteurs biologiques, combien, lesquels? Une barrière supplémentaire de filtration au charbon activé? Quel serait votre taux d’efficacité de décontamination, votre taux d’enlèvement? A quel prix?
– Est-ce possible de mettre en opération de tels procédés dans une échéance rapprochée; selon la municipalité, pour des dizaines de milliers, des centaines de milliers, ou des millions de personnes?
– Ca couterait combien d’ajuster votre ligne de traitement à la nouvelle menace des HAP? Qui paierait pour ces nouvelles étapes de traitement? Est-ce nouveau, ou prévu dans vos plans? La vieille ligne Enbridge 9B est en fonction présentement, vous le savez? Et notre puise d’eau se situe à quelle distance?
– Quelles seraient les conséquences d’une fuite majeure dans les conditions actuelles? Que dit votre plan de sécurité civile à ce sujet? Avez-vous organisé des rencontres relatives à cette menace bien réelle? Avez-vous formé des intervenants? Que faîtes-vous en cas de bris de conduite, vous fermez l’eau? Quel est votre plan de contingence? Comment se structure l’approvisionnement d’urgence en eau de vos citoyens?
– Combien nous coûtent présentement les mesures d’ajustement en termes de sécurité et en termes d’approvisionnement en eau pour s’ajuster à la mise en service de la ligne Enbridge?
Réalité inquiétante en ce début de BAPE.
Il est important de rappeler aux responsables municipaux que le rôle fondamental d’un spécialiste du traitement des eaux, selon les manuels de formation, c’est de protéger sa source d’approvisionnement. En ce début d’évaluation du BAPE, ils devraient tous venir partager leur inquiétude.
Les spécialistes doivent comprendre que toutes les barrières qui constituent le système de traitement sont conçues à partir des contaminants connus de la source. Lorsqu’on a construit les installations, et déterminé les barrières de traitement pour la grande région de Montréal; la contamination au pétrole ne faisaient pas parti de l’équation. Ils n’ont plus le choix, ils doivent s’ajuster!
L’eau est la raison d’être des municipalités, c’est sur la base des services d’égouts et d’aqueduc que votre compte de taxes est établis. La principale responsabilité d’un maire est de protéger sa source d’approvisionnement, et de contrôler les rejets de ses égouts afin de ne pas contaminer la source des autres municipalités. Pourquoi n’ont-ils pas cherché à protéger votre source d’eau? Combien cette négligence va-t-elle vous coûter? Seront-ils en première ligne en ce qui concerne Énergie-Est?
Comment les maires de la Communauté Métropolitaine de Montréal (CMM) ont-ils pu autoriser le flot de la ligne 9B Enbridge? Déjà, des signes d’ouverture chez les maires s’expriment quant à Énergie-Est? Aucune exigence stricte pour forcer le passage de ces pipelines dans un tunnel ne s’exprime? Mais comment est-ce possible? Ces questions mobiliseront une bonne partie de vos taxes municipales, car elles resteront certainement longtemps à l’agenda des rencontres de travail de notre beau monde de la gestion municipale au Québec. Ces coûts directs aux citoyens sont-ils refilés aux promoteurs de l’exportation pétrolière?
Les inquiétudes sont plus que justifiées.