Dès sa création en 1987, la prévention de la violence en milieu jeunesse a été une préoccupation majeure du Centre de ressources sur la non-violence. L’organisme a toujours agi comme lieu de vigie sur les questions de violence sociale et s’est très rapidement penché sur la gestion saine des conflits interpersonnels et sur la prévention de la violence en milieu jeunesse.
Le CRNV
Incorporé en 1988 sous la loi sur les compagnies du Québec comme organisme sans but lucratif ayant pour objet principal d’éduquer les personnes face aux problématiques relatives aux violences sociales, le Centre a toujours maintenu des liens avec des organismes internationaux pionniers sur les questions de non-violence comme le MAN en France et le Community Board de San Francisco.
Pionnier en résolution des conflits
Dès sa première année d’activité, en collaboration avec le Conseil communautaire Côte-des-Neiges, le Centre met en place un service de médiation communautaire pour faciliter la gestion des conflits interpersonnels entre voisins. Des formations à la médiation sont aussi offertes aux jeunes de la Maison des jeunes située au Centre communautaire, ce qui a pour effet d’éveiller l’intérêt de la communauté. Au mois de septembre de la même année, au moment de la rentrée scolaire, à la suite de problèmes de conflits interethniques dans les écoles secondaires du quartier, le Centre offre aux écoles secondaires des commissions scolaires CEPGM (Van Horne) et Jérôme Le Royer (Anjou) de démarrer deux projets pilotes de formation des jeunes à la saine gestion des conflits et à la médiation en s’appuyant sur les travaux de NAME (National Association for Mediation in Education). Le Centre relève ce premier défi dans des écoles secondaires, et comme il s’agit des deux premiers projets pilotes en ce sens au Québec, le CRNV fait figure de pionnier sur les questions de formation à la saine gestion des conflits en milieu scolaire au Québec.
La prévention en action
Les projets pilotes conduits sur deux ans seront une expérience exceptionnelle qui permettront au CRNV dès 1990 d’agir comme consultant et formateur à la CECM et au Centre Mariebourg dans le développement de programmes de formation à la prévention de la violence par la gestion saine des conflits. Dans le cas du Centre Maribourg, le travail sera à l’origine du développement du programme Vers le Pacifique popularisé dans de nombreuses écoles du Québec. À la CECM, les ateliers offerts par le CRNV seront à la base de la création d’un service interne de formation à la prévention de la violence, qui sera aboli avec la réforme des commissions scolaires en 1998.
Dès 1994, avec la publication du recueil d’outils d’animation intitulé La Conciliation : de la rivalité à la coopération, le Centre de ressources sur la non-violence devient un acteur incontournable dans le domaine de la formation à la gestion saine des conflits interpersonnels par la médiation et la conciliation dans la région de Montréal. Le Centre offre de nombreux ateliers sur la prévention de la violence dans le cadre de colloques, ainsi que dans les écoles, les camps de jour, en collaboration avec les services sociaux, et dans certains groupes communautaires. C’est à ce moment-là qu’un contact plus étroit s’établit avec la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal (CEPGM).
Au cours des années scolaires 1996-1997 et 1997-1998, le Centre obtient le mandat de piloter la mise en œuvre de programmes de formation à la prévention de la violence et à la non-violence par la médiation auprès d’une dizaine d’écoles de la CEPGM. Le Centre développe alors une expertise dans l’évaluation des situations de violence et dans le développement de plans d’action en prévention de la violence. Chaque école a des besoins différents et demande une mise en œuvre particulière à sa réalité. Le travail avec la CEPGM s’échelonnera sur trois ans occupant trois contractuels à mi-temps, chacun responsable d’un groupe d’écoles. Les activités mises de l’avant sont multiples : la création de locaux de repos, l’appropriation des règles de vie, l’amélioration des conditions de jeu dans la cour et une foule d’autres initiatives. La réponse aux besoins immédiats devient la clé du succès dans la relation avec le milieu et permet l’ouverture vers un transfert de nouvelles habiletés. Malgré le haut niveau de satisfaction des écoles, les programmes sont abolis à la suite de la refonte des commissions scolaires sur l’Île de Montréal. La nouvelle commission scolaire francophone a déjà son service interne de formation à la prévention de la violence.
Arts et histoire de la non-violence
Au début des années 2000, dans le contexte de la Décennie pour une culture de la non-violence et de la paix de l’UNESCO, le Centre a dû réévaluer son approche de travail à la fin de son mandat à la CEPGM, et recommencer à répondre à des demandes de sessions à la pièce. En collaboration avec la CEQ, maintenant la CSQ, le Centre a développé une offre de service de prévention de la violence qui incluait la création d’un instantané des lieux de violence potentiels dans le milieu, l’amélioration des habiletés de communication, le recours aux tierces parties et l’intervention préventive. La démarche d’un instantané était suivie par la création d’un comité de prévention de la violence qui était guidé dans le développement d’un plan d’action adapté aux besoins du milieu. Ce programme a été appliqué dans une demi-douzaine d’écoles. Le passage par chacun des conseils d’établissement des écoles, et le travail à la pièce pour mettre en place les initiatives s’est avéré fastidieux et peu rentable pour l’organisme.
En 2003, le Centre a développé une entente de deux ans avec le distributeur de matériel pédagogique Brault et Bouthillier pour élaborer une collection thématique de matériel pédagogique sur la non-violence et la paix, qui est maintenant disponible. Le Centre a également développé des contacts avec les milieux artistiques. Trois symposiums annuels de peintres portraitistes ont été organisés afin de construire une collection unique de portraits de personnages qui ont marqué l’histoire mondiale de la non-violence et de la paix. Grâce à la cession des droits des artistes, le Centre a pu distribuer dans les écoles des collections de reproduction des œuvres et animer des ateliers thématiques sur les «Artisans de la non-violence.» Plusieurs écoles ont acheté la collection complète des 50 reproductions et le Centre a pu offrir un bon nombre d’animations sur les personnes honorées par la collection. L’exposition met en valeur la contribution à la paix d’artisans provenant de toutes les cultures.
Vers un réseau des organismes d’éducation à la paix
Des liens ont été établis avec les milieux communautaires, plus particulièrement avec le Mouvement d’éducation populaire et d’action communautaire du Québec (MÉPACQ) et avec les Tables régionales d’organismes volontaires d’éducation populaire (les TROVEP). Plusieurs ateliers de formation ont été offerts à des organismes travaillant directement en milieu jeunesse. Le Centre a participé au développement d’une trousse de matériel pédagogique en prévention de la violence préparée par l’Institut Philippe Pinel qui a été diffusé dans les écoles. Des ateliers ont également été offerts dans le cadre d’assemblées annuelles des maisons de jeunes du Québec et dans les milieux des coopératives d’habitation. Cette période d’activités dans les milieux d’action communautaire s’est aussi avérée financièrement difficile à cause du manque de ressources du milieu et de la gestion de multiples petits contrats à la pièce. Elle a, par contre, permis au Centre de mieux connaître l’action de divers organismes québécois dédiés à la non-violence et à la paix en milieu jeunesse et de collaborer avec eux dans le cadre d’activités variées (Journée internationale pour la paix, Colloque des Établissements verts Brundtland, formations, festivals de paix et forums sociaux). En collaboration avec les autres organismes de paix, le Centre a pu participer aux trois dernières éditions du Salon international des initiatives de paix à Paris afin de partager sur les initiatives citoyennes d’action pour la paix.
Les lieux d’intervention du Centre se sont, avec le temps, grandement diversifiés. Le Centre a agi à de nombreuses reprises comme organisme conseil afin de mieux outiller des centres communautaires, des intervenants des YMCA et des organismes d’intervention en milieu ethnique comme le Centre Afrika, ainsi que des organismes jeunesse d’intervention préventive en HLM, ce qui a permis de mettre en place des initiatives de prévention de la violence en milieu communautaire. Le Centre a aussi, au cours des années, été appelé à intervenir dans des situations de violence en milieu autochtone, entre autres à Akwasasne près de la frontière Ontarienne, à Maliotenam près de Sept-îles et dans des communautés autochtones Mohawks de la région de Montréal.
De plus, depuis 2004, le CRNV a développé des liens plus étroits avec le Centre de formation sociale Marie-Gérin Lajoie qui offre des formations dans le domaine de la communication non-violente, avec la Maison de l’Amitié qui s’intéresse à une meilleure intégration de jeunes d’origine ethnique, et avec le projet LOVE qui utilise le domaine des technologies de communication pour intéresser les jeunes du secondaire à la non-violence. Au fil du temps, divers réseaux d’organismes de paix se sont développés, dont plusieurs ont été impliqués dans la mise en place d’initiatives de prévention de la violence dans les milieux scolaires. Le Centre a étroitement collaboré à mettre sur pied la Coordination canadienne pour une culture de la paix et de la non-violence. Cette coordination regroupe actuellement seize organismes de paix, dont une douzaine sont directement impliqués dans le développement d’initiatives de paix dans les milieux scolaires.
Le Centre de ressources sur la non-violence possède donc une longue expérience d’engagement pour la paix dans les milieux jeunesse. Au cours des années, il a développé une approche particulière à la prévention de la violence dans les milieux scolaires et il a aussi travaillé au développement d’un réseau d’organismes possédant une expertise diversifiée et pertinente pouvant servir à la mise en œuvre de programmes de prévention efficaces.