Dans l’optique d’améliorer les initiatives de prévention dans le milieu de la santé, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a intégré à sa définition de prévention les trois niveaux suivants : primaire, secondaire et tertiaire. Au fil du temps, plusieurs organisations de différents secteurs ont repris cette référence afin de l’adapter à leurs approches, permettant ainsi d’observer une évolution des perspectives de prévention selon les objectifs souhaités. Comment s’orchestre donc cette prévention dans les milieux associatifs au Québec? En quoi les actions sur le terrain reflètent-t-elles les différentes avenues de prévention? Afin d’en dresser un portrait global, il importe d’abord de bien saisir la portée des trois types de prévention.
La prévention primaire permet d’abord, par l’observation de la population et les individus, de détecter les premiers signes d’une problématique et de déceler les facteurs de risque pouvant mener à un premier épisode de violence. Cette approche est employée en amont du problème afin de diminuer les risques qu’une situation ne se produise. Plusieurs éléments peuvent être inclus dans la prévention primaire :
- L’accompagnement communautaire préventif de personnes vulnérables;
- La formation du personnel et de la population pour détecter les profils et intervenir;
- L’organisation de la transmission sécuritaire et confidentielle d’informations provenant des proches témoins de signes possibles d’éventuelles violences;
- L’organisation de la détection avancée de problématiques par des organismes intervenants en première ligne;
- L’aménagement de lieux publiques sécuritaires aux endroits à risque;
- La construction d’un filet de soutien individuel pour les clientèles vulnérables.
Des défis importants persistent au niveau de la prévention primaire. Le manque de financement est récurrent, notamment puisqu’il est difficile de constater et d’évaluer les résultats de la prévention primaire, surtout à court terme.
La prévention secondaire, de son côté, se réalise plutôt dans une approche individuelle. Elle correspond aux méthodes et aux techniques à appliquer afin de gérer activement une situation violente ayant lieu ou ayant eu lieu.
Une grande partie des services offerts par les organisations à but non-lucratif (OBNL) en prévention de la violence est axée vers ce type de prévention. La création d’un centre pour femmes et enfants victimes de violences familiales constitue un exemple d’action de prévention secondaire puisqu’il s’agit d’une solution en réaction à des situations violentes courantes ou passées. S’il est vrai que cet exemple de prévention comporte un angle primaire, dans l’optique où des personnes à risque élevé peuvent y avoir recours, le service est surtout offert et organisé en fonction de personnes vivant des événements de violence. L’essentiel des ressources en prévention est investi au niveau secondaire: lorsque des gestes de violence ont été posés, il est souvent assez facile de compiler des interventions et de démontrer l’impact de cette forme de prévention dans la vie des individus.
En troisième lieu, la prévention tertiaire peut s’inscrire autant dans une approche individuelle que collective. Il est question d’éviter les récidives d’actes de violence après avoir procédé à l’identification de ces derniers, au moyen d’interventions et de suivis individuels ou de groupe. Ce mode de prévention permet la mise en place d’un cadre afin de réduire le risque de nouvelles situations de violence, ou pour protéger les victimes. L’aide extérieure en est une composante essentielle afin d’éviter qu’une situation se reproduise, notamment par l’implication d’un.e intervenant.e, la création d’un nouveau filet de sécurité ou la participation à des groupes de discussion. La prévention tertiaire implique généralement des actions de réparation. Il est facile d’évaluer l’impact de telles interventions sur la société et d’obtenir du financement à leur effet, car elles découlent souvent directement d’interventions secondaires.
Il est à noter que plusieurs méthodes d’interventions tertiaires pourraient être utilisées en guise de prévention primaire.
Les trois niveaux de prévention se caractérisent par des moyens d’actions distincts. Actuellement, le système public et les OBNL sont principalement organisés en fonction de la gestion post-événement et à court terme. De véritables programmes de prévention secondaire et tertiaire ont été mis en place. Toutefois, il existe un vide à combler au niveau de la prévention primaire. Le fait qu’il n’y ait pas de consensus quant à la nature même de cette dernière complexifie sa mise en place: pour certain.e.s intervenant.e.s, la violence est circulaire et n’implique jamais de niveau primaire. Actuellement, la majorité des interventions en prévention primaire au Québec ne se limitent qu’à des initiatives ponctuelles d’éducation et de formation thématique. L’intervention par programmes véritablement structurés se déploie surtout après une crise. Pourtant, investir en amont permet de diminuer les coûts en aval. Comment réduire le risque de violence à la source, avant même que celle-ci ne puisse avoir lieu?
Il existe quelques pistes de solution à considérer. L’aménagement de lieux de détection des personnes vulnérables, la formation de personnel à la détection et à l’intervention face à la clientèle repérée, l’accompagnement préventif comme forme de soutien actif aux personnes identifiées comme vulnérables et la mise en place de protocoles de communication sécuritaire avec l’entourage, sont toutes des actions qui s’inscrivent dans la prévention primaire. La prévention de la violence, la diminution de son incidence au quotidien et le renforcement de la résilience communautaire doivent passer par l’élaboration de programmes rigoureux et structurés de prévention primaire de la violence.
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